La Rumeur

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Il est des groupes de Rap dont le souci majeur consiste à ramener leur art à ses racines sulfureuses et contestataires.
Avec à son actif près de 10 années d’activisme Hip Hop, La Rumeur en administre une des plus parfaites illustrations. 10 années de clash. 10 années blanches et sèches. 10 années au cours desquelles se sont enchevêtrés l’apprentissage de l’indépendance, l’incursion en major, l’art de brûler les planches (plus de 180 concerts à ce jour), les démêlés judiciaires (dont un procès face au ministère de l’intérieur), et la réflexion permanente autour de l’idée de réappropriation et d’héritage historique post-colonial. 10 années durant lesquelles La Rumeur édite coup sur coup une trilogie de Maxi 5 titres, 2 albums, ainsi qu’un magazine au nom du groupe en guise de point de fuite à l’univers sombre et politisé du combo banlieusard le plus honni des tympans bourgeois. Autant de douilles au pied des oripeaux triomphants. Autant d’insatiables déclinaisons du « rap de fils d’immigrés ». 10 années enfin, au termes desquelles La Rumeur crée son propre label et relance l’invective discographique par son tout dernier album Regain de Tension à surveiller comme l’acide sur la peau. Le chemin fut tortueux. Que voulez-vous ? On ne prend pas le maquis rapologique sans écoper de callosités.
Fin 1995 Philippe, Ekoué, Mourad, Hamé ,pour la partie texte et kool M et Soul G (leurs deux concepteurs sons attitrés) se dotent du concept de la rumeur en tant que véhicule d’un contre langage, émanation brute des quartiers populaires d’Ellancourt dans les Yvelines.
De 1997 à 1999 le collectif pose les bases du projet La Rumeur. Trois volets d’une trilogie de maxi 5 titres et autant de pièces agencées pour un rap pensé comme arme et instrument à même de poser des mots sur les maux et révéler l’envers pourri du décor. Trois galettes qui très rapidement hissent le groupe parmi les fleurons de l’underground parisien. C’est aussi l’heure des premiers concerts d’envergure nationale (Paris, Nantes, Lille, Bourges, Rennes, Montpellier, Strasbourg, Marseille...). Au termes d’une tournée sauvage ponctuée de nombreux ateliers d’écritures aux quatre coins de l’Hexagone la trilogie de La Rumeur s’enorgueillit d’un impact croissant couronné par plus de 40 000 exemplaires écoulés à la force du micro et de la scène sans aucune rotation radio, ni promotion tapageuse. Ce qui n’est pas sans attirer « l’attention » d’un certain nombre de multinationales du disque au rang desquelles Emi Music qui en bonne négociatrice cède aux fermes exigences du groupe : carte blanche pour la réalisation du véritable premier album de la Rumeur.
Avril 2002, l’album L’Ombre sur la mesure qui s’écoulera à plus de 40 000 exemplaires génère un succès d’estime immédiat et lance La Rumeur au devant d’une tournée marquée par une prestation d’éclat aux Transmusicales de Rennes ainsi qu’une mini tournée avec Noir Désir qui contacte le groupe quelques semaines plus tôt. En deux ans La Rumeur popularise sa définition artistique et éthique du Hip Hop. Concerts et ateliers d’écritures à travers la France (plus de 60 dates parmi lesquelles les festivals des Eurockèennes , le Printemps de Bourges, les Vieilles Charrues...), s’enchaînent au rythme des plébiscites du public et... des convocations judiciaires pour outrage et diffamation.
Fin 2002-début 2003 s’ouvre en effet une ère de batailles politico-juridiques initiées par la double plainte émanant d’une part de la Station FM Skyrock, et de Mr Sarkozy au nom du Ministère de l’intérieur d’autre part. Ces attaques prennent pour « appui » deux articles que le groupe signe de sa plume dans son propre organe de presse La Rumeur magazine N°l. Au terme d’une année de procédure policière, la plainte de Skyrock échoue lamentablement au grand dam de ses instigateurs. En revanche la seconde poursuite débouche sur un procès en « diffamation publique envers la police nationale » dont le jugement sera prononcé le 12 novembre 2004 par les magistrats de la 17ème chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris,
2004. En dépit du harcèlement judiciaire manifeste dont ils sont la cible, les membres de La Rumeur créent coup sur coup leur propre label (La Rumeur Records distribué par Emi music), le deuxième numéro de la Rumeur magazine, et Regain de Tension leur tout dernier album, dur mais lumineux, à inscrire dors et déjà au Panthéon des écorchés-écorcheurs. Plus que jamais pour La Rumeur, l’époque est à l’épreuve de force.